Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/109

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Le timide indigent dans son obscur réduit ?
Ils chantent : l’heure vole, et la douleur s’enfuit.
Jeune et discret amant, toi qui, dans ton ivresse,
N’as pu fléchir encor ton injuste maîtresse :
Dans le mois qui nourrit nos frêles rejetons,
Et voit poindre les fleurs à travers leurs boutons,
Sur la scene des champs n’oses-tu la conduire ?
La nature est si belle à son premier sourire !
Qu’avec toi ton églé contemple ces tableaux,
Et l’émail des vallons, et l’argent des ruisseaux :
Dans cet enchantement, que sa main se repose
Sur ce frais velouté qui décore la rose ;
Qu’elle puisse à longs traits en respirer l’odeur :
Le plaisir de ses sens va passer dans son cœur.
Si de tous ces attraits elle osoit se défendre,
Joins-y la volupté d’un chant flexible et tendre :
Tu l’entendras bientôt en secret soupirer…
Et je laisse à l’amour le soin de t’éclairer.
L’art des sons n’est que l’art d’émouvoir et de plaire ;
C’est le plus doux secret pour vaincre une bergere :
Mais bannissez l’apprêt ; il nous glace ; et le chant,
S’il est maniéré, cesse d’être touchant.
Évitez avec soin la molle afféterie ;
Qu’avec légéreté votre voix se varie.
Jaloux de l’embellir, craignez de la forcer ;
Un organe contraint ne peut intéresser.