Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/57

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Que jamais vos regards n’aillent furtivement
Mendier la faveur d’un applaudissement.
Le public dédaigneux hait ce vain artifice ;
Il siffle la coquette, il applaudit l’actrice.
Offrez-nous un maintien, un port majestueux ;
Que d’abord votre marche en impose à nos yeux :
Au gré des mouvemens qui vous ont agitée,
Qu’elle soit à propos lente ou précipitée.
Que le geste facile et sans art déployé,
Avec le sens des vers soit toujours marié.
Songez à réprimer son emphase indiscrete ;
Qu’il soit des passions l’éloquent interprete,
Développe à nos yeux leur flux et leur reflux,
Et devienne pour l’ame un organe de plus.
Des passages divers décidez les nuances ;
Ponctuez le repos, observez les silences.
Le jeu muet encor veut une étude à part :
Il est et le triomphe et le comble de l’art.
C’est là que le talent paroît sans artifice,
Et que toute la gloire appartient à l’actrice.
Il faut, pour le saisir, savoir l’ouvrage entier,
En suivre les ressorts, et les étudier ;
Réunir d’un coup-d’œil tous les traits qu’il rassemble,
Et ces effets cachés qui naissent de l’ensemble.
Tel, dans tout ce qu’il trace, un peintre ingénieux
Doit chercher des couleurs l’accord harmonieux.