Page:Dorgelès - Les Croix de bois.djvu/145

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Mes jambes tremblent. Je n’ai pas peur, pourtant. J’avance d’un pas étouffé et mes mains froides fouillent le noir, reconnaissent les choses. Mes yeux qui scrutent s’habituent. Je reconnais une capote qui sèche, bras pendants.

De l’autre côté de la cloison de planches, les pigeons s’agitent toujours. J’approche, et lentement, pour étouffer le cri aigu des gonds qui grincent, je pousse la porte… Le cou tendu, le poing serré, je regarde. Rien, rien…

La clarté lunaire qui filtre par les tuiles éclaire les pigeons, en boule sur les perchoirs. Un roucoule. Dehors, le vent siffle un air aigu, les lèvres pincées…

Alors, je referme la porte qui grince, et seul, tout seul, dans le grenier obscur, je regarde la triste défroque aux bras pendants, cette capote lasse où mourra un soldat.