temps. Au milieu d’eux scintillant et léger, tournoyait un avion. Sur des coins de table, assis sur une brouette ou sur un timon de voiture, accroupis sous leur tente ou le dos au mur, des soldats écrivaient. Dans un pré, on jouait au foot-ball avec de grands cris, et des camarades suivaient la partie, à cheval sur des selles lustrées, tout en se faisant tondre les cheveux par les muletiers du train de combat.
De l’autre côté du village, les venelles étaient désertes. Pourtant, des sureaux fleuris dont le parfum candide s’aspirait comme un apaisement.
— Vrai, ce n’est pas un temps pour aller se battre, soupira Gilbert, mordillant une tige d’anis.
Lambert, qui nous suivait le nez baissé, parut se réveiller :
— Un temps pour se battre ! s’emporta-t-il. C’est dans le Pêle-Mêle que tu as lu ça !… Ah ! ils connaissent de bonnes blagues tous les petits coquins qui écrivent sur la guerre… Mourir au soleil, tu parles d’une affaire !… Tiens, je voudrais bien en voir un crever la gueule ouverte dans le barbelé, pour lui demander d’apprécier le paysage…
Et passant sa colère sur des ombelles, qu’il fauchait d’un coup de badine, il bougonna rageusement :
— Qu’on y envoie le vieux pèlerin, puisqu’il veut venger ses fils !
Glissant de feuille en feuille, le soleil tombait en larges gouttes sur le chemin. Un ruisseau coulait entre les mauves, entraînant de longues algues dénouées : les cheveux d’Ophélie. Sous bois, des camarades cueillaient des fleurs, avant de cacheter leur lettre.
— Allons, ne pensons pas trop, dit Gilbert en se