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VENGEANCE FATALE

— C’est assez facile, mais si elle refuse.

— Elle ne refusera pas, si vous forcez un peu la note ; elle n’osera pas désobéir à son père.

— C’est bien, je vais de ce pas lui signifier ma volonté.

Edmond s’éloigna sur cette bonne parole.

Quoique l’église de Notre-Dame soit assez éloignée de son logis, Darcy en franchit cependant l’espace très rapidement. En entrant, il aperçut Malthilde, qui demanda à son père s’il attendait quelque étranger.

— Non, répondit-il, je ne crois pas qu’il vienne personne ; dès que le dîner sera prêt, fais le mettre sur la table.

— Le dîner est prêt et la table est servie, nous n’attendons plus que vous.

— Mettons nous donc à table alors.

Toute la durée du repas, Darcy parla fort peu. Il portait ses yeux souvent du côté d’Hortense. Il lui répugnait encore de causer le malheur irréparable de cette jeune fille si aimable, si douce, si tendre, qui lui avait toujours témoigné la plus filiale affection. Son caractère, cruel, reculait, néanmoins, devant la pensée de sacrifier à jamais une femme adorable à un misérable comme Marceau. De plus il s’était chargé de son éducation alors qu’elle était toute petite, et depuis il l’avait toujours aimée beaucoup, sinon aussi tendrement que Mathilde. Aussi reculait-il le plus possible le moment d’informer Hortense de la terrible demande d’Edmond.

On rencontre souvent des personnes qui, nonobstant un égoïsme et une méchanceté éprouvés, ne sont pas moins susceptibles de comprendre la tendresse des