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Page:Dorion - Vengeance fatale, 1893.djvu/22

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VENGEANCE FATALE

Sur le chemin le père lui tirait les oreilles.

— Mauvais drôle, lui disait-il, n’as-tu pas songé aux larmes que tu ferais verser à ta mère en te sauvant ainsi ?

— Oui, répliqua l’enfant, j’y ai songé, mais pourquoi m’avez-vous battu ?

Il y avait dans cette réponse une résolution si énergique que monsieur de Lagusse comprit qu’à la plus légère réprimande, Raoul s’esquiverait de nouveau et, si bien cette fois, qu’il se mettrait hors de l’atteinte de ses parents. Le père le traita donc avec plus de douceur, mais sans plus de succès ; l’enfant était déciment entré dans une mauvaise voie et il devenait de plus en plus indisciplinable. Lorsqu’on crut le temps arrivé de le mettre au collège, il s’y fit remarquer par des talents brillants, ce qui ne l’empêcha pas, après plusieurs avis adressés à son père par les directeurs de l’établissement d’en être expulsé à cause de ses méfaits.

Quand Raoul perdit sa mère, il était âgé de dix-huit ans ; la mort de la malheureuse femme avait été grandement accélérée par l’inconduite de son fils. M. de Lagusse finit par perdre patience et, renonçant définitivement à faire de son fils un honnête homme par les voies ordinaires, il le confia à un capitaine de corvette, qui voulut bien se charger de lui. Quand Raoul apprit cette nouvelle, il en fut ravi : « Je verrai donc enfin du pays, dit-il, je trouverai du plaisir selon ma fantaisie et, ma foi, si plus tard je désire me soustraire au joug de ce vieux matelot, je serai bien malheureux si je ne réussis pas à m’esquiver. »

Raoul fut donc placé à bord de la corvette la Mon-