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longtemps il se complut dans sa solitude. Mais sur la fin de sa vie il en souffrit, et il découvrit enfin son cœur à ceux qui, durant tant d’années, n’avaient connu que son génie. C’est dans le désir de faire mieux aimer ce cœur timide, cette âme haute, que ces notes ont été rédigées avec piété.


I


Bourbon. — Une île qui contient en abrégé toute la nature ; depuis le volcan embrasé, dont les laves en coulant font fuser la mer, jusqu’aux pics glacés des monts couverts de neiges éternelles ; depuis les forêts de palmiers géants, où les colibris nichent dans les lianes, jusqu’aux palais de coraux, pourpres et roses, aux enchevêtrements étranges, où circulent les poissons nacrés, où les hautes lames s’arrêtent et s’écrasent sur les récits blancs.

C’est là, sur la côte qui regarde l’Afrique, à Saint-Paul, que le poète naquit en 1818. Dans une note rédigée pour servir un jour à sa biographie, il nous apprend lui-même qu’un de ses aïeux, le marquis François de La Nux, avait dû quitter la France à la suite d’une conspiration contre le Régent et était allé s’installer à l’île Bourbon en 1720. La mère du poète, Suzanne-Marguerite-