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Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/264

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murmura-t-il, se mordant les lèvres et serrant les poings… Mais non ; je ne puis le croire. Il ne dira rien ; c’est un cœur vraiment généreux ; il aura pitié d’elle…

— Qu’il ait pitié d’elle ou non, répondis-je résolument, votre devoir est, en tout cas, de demander demain même la main de Nastassia Evgrafovna. — Et comme il me regardait, immobile, je repris : — Comprenez, mon oncle, que si cette aventure s’ébruite, la jeune fille est déshonorée. Il vous faut donc prévenir le mal au plus vite. Vous devez regarder les gens en face, hardiment et fièrement, faire votre demande sans tergiverser, vous moquer de ce qu’ils pourront dire et écraser ce Foma, s’il a l’audace de souffler mot contre elle.

— Mon ami ! s’écria mon oncle, j’y avais déjà pensé en venant ici.

— Et qu’aviez-vous résolu ?

— Cela même ! Ma décision était prise avant que j’eusse commencé mon récit.

— Bravo, mon oncle ! et je me jetai à son cou.

Nous causâmes longtemps. Je lui exposai la nécessité, l’obligation absolue où il était d’épouser Nastenka et qu’il comprenait d’ailleurs mieux que moi. Mon éloquence touchait au paroxysme. J’étais bien heureux pour mon oncle. Quel bonheur