Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/313

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— Mais ce sont des sottises ! s’écria mon oncle avec inquiétude. C’est impossible ! Il ne reste que dix-neuf hommes de toute une armée auparavant très considérable. Qu’est-ce que cela, mon ami ?

Mais Sacha n’y tint plus et partit d’un franc éclat de rire de gamine et, bien que la pièce n’eût rien de bien drôle, il était impossible de la regarder sans partager son hilarité.

— C’est une poésie comique, papa ! s’écria-t-elle, toute joyeuse de son idée enfantine. L’auteur ne l’a composée que pour faire rire, papa !

— Ah ! c’est une poésie comique ! fit mon oncle dont le visage s’éclaira, une poésie comique ! C’est ce que je pensais… Parbleu ! parbleu ! c’est une poésie comique ! Et elle est très drôle : ce Gomez qui ne donnait que du lait à toute son armée pour tenir un vœu ? C’était malin, un vœu pareil !… C’est très spirituel ; n’est-ce pas, Foma ? Voyez-vous, ma mère, les auteurs s’amusent parfois à écrire des poésies fantaisistes ; n’est-ce pas Serge ? C’est très drôle ! Voyons, Ilucha, continue.

Il ne reste plus que dix-neuf hommes !
Don Pedro les réunit
Et leur dit : « Ô mes dix-neuf !
Déployons nos étendards,
Sonnons de nos cors,
Et nous laisserons là Pamba.