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Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/340

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main et l’embrassait coup sur coup, faisant ses adieux à son élève qui pleurait à chaudes larmes sans trop savoir pourquoi. Éjévikine et Mizintchikov s’entretenaient à l’écart. Je crus bien que Bakhtchéiev allait suivre l’exemple des jeunes filles et se mettre à pleurer, lui aussi. Je m’approchai de lui.

— Non, mon petit père, me dit-il, Foma Fomitch s’en ira peut-être d’ici, mais le moment n’en est pas encore arrivé ; on n’a pas trouvé de bœufs à corne d’or pour tirer son chariot ! Soyez tranquille, il fera partir les maîtres et s’installera à leur place.

L’orage passé, M. Bakhtchéiev avait changé d’idées.

Soudain, des cris se firent entendre : « On l’amène ! le voici ! » et les dames s’élancèrent vers la porte en poussant des cris de paon. Dix minutes ne s’étaient pas écoulées depuis le départ de mon oncle. Une telle promptitude paraîtrait invraisemblable si l’on n’avait connu plus tard la très simple explication de cette énigme.

Après le départ de Gavrilo, Foma Fomitch était en effet parti en s’appuyant sur sa canne, mais, seul au milieu de la tempête déchaînée, il eut peur, rebroussa chemin, et se mit à courir