Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/56

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— Je vous fais marcher ? demandai-je avec étonnement.

— Oui, tu m’entortilles pour me faire bavarder comme un serin et, un beau jour, tu me fourreras dans un de tes romans !

Je m’empressai d’assurer M. Bakhtchéiev que je n’étais pas homme à agir de la sorte, mais il continuait à m’observer d’un air méfiant.

— Tu dis ça, mais est-ce que je te connais ? Foma aussi me menaçait de m’imprimer tout vif.

— Permettez-moi, fis-je, désireux de quitter ce terrain brûlant, permettez-moi de vous demander s’il est vrai que mon oncle songe à se marier ?

— Qu’est-ce que ça pourrait bien faire ? Qu’il se marie si tel est son bon plaisir ; le mal n’est pas là. Il y a autre chose, répondit Bakhtchéiev pensif. Humph ! là-dessus, je ne saurais trop vous répondre. Sa maison est actuellement pleine de femmes qui sont comme les mouches autour des confitures. Mais qui sait laquelle veut se marier ? Je vous dirai, mon petit père, que je ne puis pas sentir les femmes ! Je crois qu’elles ne peuvent que nous faire déchoir et, de plus, elles nuisent au salut de l’âme ! Que votre oncle soit amoureux comme un chat de Sibérie, ça, je vous le garantis. Je ne vous en dirai pas plus long ; vous verrez par