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Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/75

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sans empressement le paysan qui ne s’attendait pas à cette attaque.

— Mais combien ?

— Il a dit qu’il y avait quelque cent ou mille verstes… qu’il y en avait beaucoup.

— Rappelle-toi ! Et tu te figurais qu’il n’y avait qu’une verste, que le soleil était tout près de nous ? Non, frérot, la terre, vois-tu, c’est comme un ballon, tu comprends ? continua mon oncle en traçant dans l’espace un geste circulaire.

Le paysan sourit amèrement.

— Oui, comme un ballon ! Elle se tient en l’air d’elle-même et elle tourne autour du soleil qui reste en place tandis que tu crois qu’il marche. Comprends-tu le système ? Tout cela a été découvert par le capitaine Cook, un marin… (Le diable sait qui l’a découvert ! me chuchota mon oncle, quant à moi, je n’en sais rien)… Et toi, sais-tu la distance qu’il y a entre la terre et le soleil ?

— Je le sais, mon oncle, répondis-je, rempli d’étonnement par cette scène bizarre. Mais voici ce que je pense : certes, l’ignorance est une sorte de malpropreté… mais tout de même… apprendre l’astronomie aux paysans !…

— Très juste ! c’est de la malpropreté ! fit mon oncle ravi, et sautant sur mon expression