cher dans le sein de Pachenka, au temps où elle pouvait voir en toi un futur gendre ; mais voilà ! tandis que l’homme honnête et sensible se laisse aller aux confidences, l’homme d’affaires les recueille et en fait son profit. Bref, elle a passé son billet en payement à ce Tchébaroff, qui ne s’est pas gêné pour te mener rondement. Lorsque j’ai su tout cela, je voulais, pour l’acquit de ma conscience, traiter aussi l’homme d’affaires par l’électricité ; mais sur ces entrefaites l’harmonie s’est établie entre Pachenka et moi, et j’ai fait arrêter la procédure en répondant de ta dette. Tu entends, mon ami ? je me suis porté garant pour toi. On a fait venir Tchébaroff, on lui a mis dix roubles dans la bouche, et il a rendu le papier, que j’ai l’honneur de te présenter. — Maintenant tu n’es plus qu’un débiteur sur parole. Tiens, prends-le.
— C’est toi que je ne reconnaissais pas, pendant que j’avais le délire ? demanda Raskolnikoff après un moment de silence.
— Oui, et même ma présence t’a occasionné des crises, surtout la fois où j’ai amené Zamétoff.
— Zamétoff ?… Le chef de la chancellerie ?… Pourquoi l’as-tu amené ?…
En prononçant ces mots, Raskolnikoff avait vivement changé de position, et maintenant il tenait ses yeux fixés sur Razoumikhine.
— Mais qu’as-tu donc ?… Pourquoi te troubles-tu ? Il désirait faire ta connaissance ; c’est lui-même qui a voulu venir, parce que nous avions beaucoup causé de toi ensemble… Autrement, de qui donc aurais-je appris tant de choses sur ton compte ? C’est un excellent garçon, mon ami ; il est merveilleux… dans son genre, naturellement. À présent, nous sommes amis ; nous nous voyons presque chaque jour. Je viens, en effet, de transporter mes pénates dans ce quartier-ci. Tu ne le savais pas encore ? J’ai déménagé tout récemment. Je suis allé deux fois chez Louise avec lui. Tu te rappelles Louise… Louise Ivanovna ?