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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN
MARS


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I


ENCORE UNE FOIS, CONSTANTINOPLE DOIT ÊTRE À NOUS TÔT OU TARD.


L’année passée, au mois de juin, j’ai écrit que Constantinople, tôt ou tard, devait être à nous. C’était alors une époque d’enthousiasme et d’héroïsme. La Russie entière suivait de ses vœux son peuple, son armée, qui partait volontairement pour servir le Christ et la foi orthodoxe contre les infidèles, pour aller en secours de nos frères de sang et de religion, les Slaves. Bien que j’eusse critiqué moi-même mon article en le qualifiant d’« interprétation » utopique de l’histoire », je croyais fermement à ce que j’écrivais, et je suis bien sûr que je n’en changerais pas un mot aujourd’hui.

Voici ce que j’ai dit alors sur Constantinople :

« Oui, la Corne d’or et Constantinople, tout cela sera à nous. Cela viendra de soi-même. Et les temps sont proches. Tout l’indique. Il semble que la nature, elle-même, en ait décidé ainsi ; Et si le fait ne s’est pas accompli, c’est que le poire n’était pas mure. »

J’expliquais alors ma pensée. Si Pierre-le-Grand, disais-je, au lieu de fonder Pétersbourg avait eu l’idée d’occuper Constantinople, je crois qu’après quelques réflexions, il aurait abandonné son projet.

En terre finnoise, nous ne pouvions guère éviter l’influence des Allemands voisins : Soit. Mais comment eussions-nous pu paralyser l’action des Grecs à Constanti-