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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

quais ; mais, disais-je, le temps se chargera de me donner raison. Il est encore difficile de préciser le moment où il sera bon d’agir, mais on peut pressentir qu’il est assez proche.

Depuis mon article, neuf mois se sont passés, des mois qu’il ne faut pas porter en compte, des mois troublés, occupés d’abord par l’enthousiasme qu’excite la guerre, par les espérances qu’elle fit naître, puis par des déceptions. On ne peut encore fixer aucune date, et je n’ai voulu qu’ajouter ici quelques paroles explicatives afin de commenter mes rêves de juin sur l’avenir de Byzance. Quoi qu’il arrive, Constantinople sera à nous tôt ou tard ; je reviens là-dessus, mais à un autre point de vue :

J’admets qu’il y ait quelque gloire la posséder un port célèbre, une illustre cité de ce monde qui a été considérée comme l’umbilicus terræ, mais je ne m’arrête pas à cette considération si flatteuse pour nous dans un avenir prochain. Je n’insisterai pas plus sur cette vérité que la Russie est comme un géant énorme qui a grandi dans une chambre close de tous côtés, sans communication avec le reste de l’univers et qui a besoin de respirer l’air libre des Océans. Je ne veux pas développer une appréciation, pour moi d’une importance extrême, bien que personne n’ait paru, jusqu’à présent, l’évaluer à sa juste valeur.


II


LE PEUPLE RUSSE N’EST QUE TROP MÛR POUR AVOIR UNE OPINION NETTE SUR LA QUESTION D’ORIENT À SON PROPRE POINT DE VUE.


Il peut sembler absurde d’entendre affirmer que les quatre siècles de la domination des Turcs dans le sud-est de l’Europe, ont fait beaucoup pour le Christianisme et l’orthodoxie, — malgré les Turcs eux-mêmes, soit, — mais