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Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/109

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pourquoi il avait tant tardé à venir. L’autre sourit d’un œil sournois, s’assit d’un air très dégagé, et jeta nonchalamment sur une chaise le chapeau au crêpe. Veltchaninov remarqua aussitôt ces allures et ouvrit l’œil.

Tranquillement, sans phrases inutiles, sans agitation superflue, il lui rendit compte de sa journée : il lui dit comment s’était passé le voyage, avec quelle bonne grâce Lisa avait été accueillie, le bénéfice qu’en retirerait sa santé ; puis, insensiblement, comme s’il oubliait Lisa, il en vint à ne plus parler que des Pogoreltsev. Il vanta leur bonté, la vieille amitié qui l’unissait à eux, il dit l’homme excellent et distingué qu’était Pogoreltsev, et autres choses semblables. Pavel Pavlovitch écoutait d’un air distrait, et jetait de temps à autre à son interlocuteur un sourire incisif et sarcastique.

— Vous êtes un homme ardent, murmura-t-il enfin, avec un ricanement mauvais.

— Et vous, vous êtes aujourd’hui de bien méchante humeur, fit Veltchaninov, d’un ton fâché.

— Et pourquoi ne serais-je pas méchant comme tout le monde ? s’écria Pavel Pavlovitch, en bondissant hors de son coin.

Il semblait n’avoir attendu qu’une occasion pour éclater.