Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/258

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dormi Pavel Pavlovitch ; et il plaça la boîte dans son bureau, qu’il ferma à clef. Puis il s’approcha de Pavel Pavlovitch, et le considéra.

Il avait réussi à se lever à grand-peine et à s’asseoir dans un fauteuil. Il n’était ni habillé, ni chaussé. Sa chemise était tachée de sang, dans le dos et aux manches ; c’était du sang de Veltchaninov.

C’était assurément Pavel Pavlovitch, mais il était méconnaissable, tant ses traits étaient décomposés. Il était assis, les mains liées derrière le dos, faisant effort pour se tenir droit, le visage ravagé, convulsé, vert à force de pâleur ; de temps en temps, il tremblait. Il regardait Veltchaninov d’un regard fixe, mais éteint, d’un œil qui ne voyait pas. Tout à coup, il eut un sourire stupide et égaré, désigna d’un mouvement de la tête la carafe, sur la table, et dit, en bégayant, tout bas :

— À boire…

Veltchaninov remplit un verre d’eau et le fit boire, de sa main. Pavel Pavlovitch aspirait l’eau gloutonnement ; il but trois gorgées, puis releva la tête, regarda très fixement, en face, Veltchaninov qui restait debout devant lui, le verre en main ; il ne dit rien, et recommença