Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/36

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lorsqu’il rentrait chez lui, de ne pénétrer dans sa chambre qu’avec dégoût.

Ce soir-là, Veltchaninov prit à peine le temps de se déshabiller. Il se jeta sur son lit, fermement décidé à ne penser à rien, et coûte que coûte, à s’endormir « à l’instant même ». Chose bizarre, à peine sa tête fut-elle posée sur l’oreiller que le sommeil le prit. Il y avait bien un mois que cela ne lui était arrivé.

Veltchaninov dormit ainsi trois heures entières, trois heures pleines de ces cauchemars que l’on a dans les nuits de fièvre. Il rêva qu’il avait commis un crime, un crime qu’il niait, et dont l’accusaient, d’un commun accord, des gens qui survenaient de partout. Une foule énorme s’était amassée et il entrait des gens, toujours, par la porte grande ouverte. Puis toute son attention se concentrait sur un homme bizarre, qu’il avait très bien connu jadis, qui était mort, et qui maintenant se présentait subitement à lui. Le plus pénible, c’est que Veltchaninov ne savait pas qui était cet homme, qu’il avait oublié son nom et ne pouvait le retrouver ; tout ce qu’il savait, c’est que jadis il l’avait beaucoup aimé. Tous les gens qui étaient là attendaient de cet homme le mot décisif, une accusation formelle contre Veltcha-