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Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/64

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savait bien, en dépit de toutes les questions qu’il se posait, que, s’il venait à retourner à T…, il retomberait immédiatement sous le charme dominateur de celle-ci. Cinq ans plus tard, il en était encore convaincu comme au premier jour, mais cette constatation ne lui donnait plus que de l’humeur, et il ne se rappelait plus cette femme qu’avec antipathie. Il était honteux de cette année passée à T… Il ne pouvait comprendre comment il avait pu être si « stupidement » amoureux, lui, Veltchaninov ! Tous ses souvenirs de cette passion ne lui donnaient plus que du dégoût : il rougissait de honte jusqu’à en pleurer. Peu à peu, cependant, il retrouva une certaine quiétude ; il tâchait d’oublier et il y avait presque réussi. Et voici que soudain, après neuf ans, tout cela ressuscitait d’une manière étrange devant lui, à la nouvelle de la mort de Natalia Vassilievna.

Maintenant, assis sur son lit, hanté d’idées sombres qui se pressaient en désordre dans sa tête, il ne sentait, il ne voyait distinctement qu’une chose : c’est que, malgré la secousse que lui avait donnée la nouvelle, il se sentait parfaitement calme à l’idée de la savoir morte : « N’ai-je donc pour elle plus même un regret ? » se demanda-t-il. La vérité, c’est que tout ce