Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/67

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la conscience. Elle était parfaitement fidèle à son amant, mais seulement tant qu’il ne l’ennuyait pas. Elle aimait à faire souffrir ses amants, mais elle aimait aussi à les dédommager. Elle était passionnée, cruelle et sensible.

Elle haïssait la dépravation chez les autres, elle la jugeait avec une dureté impitoyable, et elle était elle-même dépravée. Il eut été absolument impossible de l’amener à se rendre compte de sa propre dépravation. « C’est très sincèrement qu’elle l’ignore, jugeait déjà Veltchaninov lorsqu’il était encore à T… C’est une de ces femmes, pensait-il, qui sont nées pour être infidèles. Il n’y a pas de risque que les femmes de cette espèce tombent tant qu’elles sont filles : c’est la loi de leur nature qu’elles attendent pour cela d’être mariées. Le mari est leur premier amant, mais jamais avant la noce. Il n’y a pas plus adroit qu’elles pour se marier. Naturellement, c’est toujours le mari qui est responsable du premier amant. Et cela continue ainsi, avec la même sincérité : jusqu’au bout elles sont persuadées qu’elles sont parfaitement honnêtes, parfaitement innocentes. »

Veltchaninov était convaincu qu’il existe des femmes de ce genre ; et il était également convaincu qu’il existe un type de maris corres-