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Page:Dostoïevski - L’Idiot, tome 2.djvu/346

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décousues que balbutiait la jeune femme. S’apercevait-il qu’elle recommençait à se désoler, il se remettait tout de suite à lui prodiguer les caresses et les mots tendres à l’aide desquels on console un baby.

IX

Durant les quinze jours qui suivirent l’entrevue racontée dans le chapitre précédent, la situation des principaux personnages de cette histoire se modifia à un tel point qu’il nous est extrêmement difficile de poursuivre notre récit sans entrer au préalable dans certaines explications. Et pourtant nous sentons que nous devons nous borner, autant que possible, au simple exposé des faits, car il est plus d’une circonstance que nous-même aurions peine à éclaircir. Un pareil avertissement paraîtra sans doute fort étrange au lecteur : comment raconter ce dont on n’a pas une idée nette ? Pour ne pas nous placer dans une position plus fausse encore, nous tâcherons d’expliquer notre pensée par un exemple, et de la sorte on comprendra peut-être en quoi consiste, à proprement parler, notre embarras, d’autant plus que cet exemple ne sera pas un hors-d’œuvre, mais bien la suite directe et immédiate du récit.

Au bout de deux semaines, c’est-à-dire au commencement de juillet, la dernière aventure de notre héros était devenue l’objet de toutes les conversations ; on en parlait comme d’une anecdote étrange, fort amusante, presque invraisemblable, et en même temps à peu près certaine. Tout le monde à Pavlovsk racontait avec mille variantes qu’un prince, sur le point d’épouser une jeune fille appartenant à une famille honnête et connue, s’était toqué d’une lorette, avait rompu avec sa fiancée, et, bravant l’indignation publique, comptait s’unir prochainement à une femme perdue. L’histoire était