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Page:Dostoïevski - L’Idiot, tome 2.djvu/85

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entrer. Attends un peu : tu auras à ta solde une police particulière, toi-même tu seras sur pied jour et nuit, tu épieras tout ce qu’on fera là, si toutefois…

— Laisse, ne me parle plus de cela ! interrompit vivement Muichkine. — Écoute, Parfène, tout à l’heure, avant ton arrivée, je me promenais ici et tout d’un coup je me suis mis à rire, de quoi ? — je n’en sais rien, mais je me suis rappelé que justement c’est demain l’anniversaire de ma naissance. Il est maintenant près de minuit. Viens attendre chez moi la journée de demain ! J’ai du vin, nous en boirons ; souhaite-moi ce que moi-même à présent je ne sais pas désirer ; je tiens surtout à tes souhaits ; de mon côté, je fais des vœux pour ton entier bonheur. Si tu ne veux pas, rends-moi ma croix ! Tu ne me l’as pas renvoyée le lendemain ! Tu la portes ? Tu l’as encore sur toi maintenant ?

— Oui, répondit Rogojine.

— Eh bien, partons. Je veux que tu assistes au début de ma nouvelle vie, car j’inaugure une existence nouvelle ! Tu ne sais pas, Parfène, qu’une nouvelle vie a commencé pour moi aujourd’hui ?

— Maintenant je vois moi-même et je sais qu’elle a commencé, je le lui dirai. Tu n’es pas dans ton état normal, Léon Nikolaïtch !

IV

Lorsque le prince, accompagné de Rogojine, approcha de sa villa, il fut fort étonné d’apercevoir une nombreuse et bruyante société réunie sur sa terrasse brillamment éclairée. On riait gaiement, on parlait haut, on paraissait même discuter avec animation ; à première vue, il était facile de deviner que toute la compagnie passait le temps de la façon la plus agréable. Et, en effet, quand le prince arriva sur la