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Page:Dostoïevski - La logeuse, suivi de deux histoires (2e édition), 1920.djvu/78

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elle enfin en éclatant de rire. Ce n’est pas moi qui puis être ton amour…

Alors elle le regarda, mais tant de tristesse se reflétait soudain sur son visage, une angoisse si désespérée se peignait sur tous ses traits, qu’Ordynov fut saisi d’un sentiment de pitié incompréhensible, maladif, de compassion pour un malheur inconnu et, avec une souffrance indicible, il la regarda.

– Écoute ce que je vais te dire, prononça-t-elle d’une voix qui allait au cœur, en serrant dans ses mains les mains d’Ordynov et s’efforçant d’étouffer ses sanglots. Écoute-moi bien ; écoute, ma joie ! Domine ton cœur et cesse de m’aimer comme tu m’aimes maintenant ; ce sera mieux pour toi, et ton cœur deviendra plus léger et plus joyeux et tu te garderas d’une ennemie redoutable et tu acquerras une sœur aimante. Je viendrai chez toi si tu le veux. Je te caresserai et je n’aurai pas honte de demeurer près de toi. Je suis restée avec toi deux jours, quand tu as été gravement malade ! Reconnais en moi ta sœur ! Ce n’est pas en vain que j’ai prié ardemment la Vierge pour toi ! Tu ne trouveras pas une autre sœur pareille. Tu peux parcourir tout l’univers, tu ne trouveras pas un autre amour pareil, si ton cœur demande l’amour. Je t’aimerai de tout mon cœur, comme maintenant, et je t’aimerai parce