Page:Dostoïevski - La logeuse, suivi de deux histoires (2e édition), 1920.djvu/98

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son sentiment pur d’auparavant. Il avait pitié de ses larmes séchées depuis longtemps. Son cœur souffrait. Il n’avait pas compris tout ce qu’avait dit Catherine, et son amour avait peur du sentiment qui troublait la pauvre femme. Il maudissait à ce moment sa passion. Elle l’étouffait et il sentait comme du plomb fondu couler dans ses veines au lieu de sang.

– Ah ! mon malheur n’est pas en ce que je viens de te raconter, reprit tout à coup Catherine, en relevant la tête. Ce n’est pas en cela qu’est ma souffrance, mon tourment ! Que m’importe que ma mère m’ait maudite à sa dernière heure ! Je ne regrette pas ma vie dorée d’autrefois. Qu’est-ce que cela me fait de m’être vendue à l’impur et de porter, pour un moment de bonheur, le péché éternel ! Ce n’est pas en cela qu’est mon malheur, qu’est ma souffrance !… Non, ce qui m’est pénible, ce qui me déchire le cœur, c’est d’être son esclave souillée, c’est que ma honte me soit chère, c’est que mon cœur ait du plaisir à se rappeler sa douleur comme si c’était de la joie et du bonheur. Voici où est mon malheur : de ne pas ressentir de colère pour l’offense qui m’a été faite !…

Un souffle chaud, haletant, brûlait ses lèvres. Sa poitrine s’abaissait et se soulevait profondément