Page:Dostoïevski - Le Double, 1919.djvu/26

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— Hum, oui, fit Christian Ivanovitch, laissant échapper la fumée de sa bouche et posant son cigare sur la table… Mais il faut suivre mon ordonnance… Je vous ai expliqué que votre cure doit consister à changer vos habitudes… Les distractions les plus variées, par exemple… fréquentez des amis, des relations… il ne faut pas être ennemi déclaré de la bouteille… soyez souvent en joyeuse compagnie.

M. Goliadkine, toujours souriant, se hâte d’observer qu’il se croit semblable à tout le monde, qu’il se distrait comme tout le monde… que, sans doute, il peut aller au théâtre, qu’il en a les moyens comme tout le monde, que pendant la journée il est à son bureau, le soir chez lui… qu’il est comme tout le monde. Il remarque en passant que son existence n’est pas plus mauvaise qu’une autre, qu’il habite un appartement à lui, qu’il a son valet Petrouchka… Ici M. Goliadkine s’arrêta.

— Hum… non ce n’est pas ça… ce n’est pas ce que j’ai voulu dire… Ce que je veux savoir, c’est si vous aimez beaucoup la joyeuse société, si vous passez gaiement votre temps… Précisons… Êtes-vous encore mélancolique, ou êtes-vous gai ?

— Moi, Christian Ivanovitch ?

— Hum, je dis, interrompit le Docteur, qu’il vous faut transformer complètement votre vie,