Page:Dostoïevski - Le Rêve de l’oncle, trad. Kaminsky, 1895.djvu/38

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saute en voiture, je vole comme un prison nier qui s’évade. — Il y a la même situation dans une élégie de Fet[1]— Or, juste à neuf verstes de la ville, en vue de la retraite de Svietozerskaïa, j’aperçois une chose étrange : une grande voiture de voyage renversée sur le flanc. Le cocher et deux grands laquais sont debout auprès, très embarrassés. Du fond de la voiture parlent des cris qui déchirent l’âme… Je pouvais passer outre, cela ne me regardait pas, mais l’humanité prit le dessus, car, comme dit Heine, elle fourre son nez partout. Je m’arrête donc. Moi, mon yamstchik Semen et une autre âme russe, nous accourons à l’aide et à nous six nous relevons la voiture. Nous la remettons sur pied, — c’est-à — dire sur patins. — Des moujiks qui portaient du bois à la ville nous ont aidés aussi (je leur ai donné un bon pourboire). Et je me dis : C’est le prince qui a passé la nuit au relais.

  1. Poète russe.