Page:Dostoïevski - Le Sous-sol, 1909.djvu/35

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gique de la conscience, c’est l’inertie, l’inertie consciente. Je l’ai déjà dit. Je répète encore que tous les gens sortant de l’ordinaire et tous les gens d’action ne sont précisément tels que parce qu’ils sont stupides et bornés. Comment j’explique cela ? Voici.

En raison de leur médiocrité, ils prennent les causes secondes, les causes les plus proches, pour des causes premières et, rapidement, aisément, ils se persuadent d’avoir trouvé un fondement immuable à leur activité, ils se tranquillisent, et c’est le plus important ! Car, pour pouvoir agir, il faut avant tout que l’on soit tout à fait tranquille, qu’il ne vous reste plus aucun doute. Eh bien, comment pourrais-je arriver à me tranquilliser, moi ? Où trouverai-je des principes fondamentaux, des bases sur lesquelles m’appuyer ? Où les prendrai-je ? Je suis à méditer : telle cause me semble première qui m’induit à une autre encore antécédente et ainsi de suite jusqu’à l’infini ! C’est en cela que consistent la conscience et la réflexion. Ce sont donc encore des lois de la nature. Quel en est le résultat ? Identique ! Rappelez-vous ce que je vous ai dit au sujet de la vengeance et que vous n’avez sûrement pas approfondi. Je vous ai dit : l’homme se venge parce qu’il croit que sa vengeance, c’est la justice ; il a donc trouvé la raison fondamentale qui est la justice et le voilà en paix de toutes manières, si bien qu’il se venge po-