Page:Dostoïevski - Le Sous-sol, 1909.djvu/61

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drait-il pas du tout l’habiter, l’abandonnant ensuite aux animaux domestiques, tels que : les fournis, les moutons et autres. Les fourmis ont un goût tout différent. Elles ont un édifice du même genre, qui est indestructible : la fourmilière.

Les fourmis respectables ont commencé par la fourmilière, et finiront aussi par là, ce qui fait grand honneur à leur constance et à leur respectabilité. Mais l’homme est un être léger, inconvenant, et peut-être, comme le joueur d’échec, n’aime-t-il que le procédé d’arriver au but lui-même. Et qui sait (on ne peut en répondre), le but auquel tend l’humanité consiste peut-être uniquement dans ce procédé incessant d’arriver ; autrement dit, dans la vie elle-même, non dans le but, qui certainement n’est pas autre chose que deux fois deux font quatre, c’est-à-dire, une formule. Mais deux fois deux font quatre ce n’est déjà plus la vie, messieurs, c’est le commencement de la mort. Du moins, l’homme a toujours eu peur de ce deux fois deux font quatre, et moi, j’en ai peur encore. Admettons que l’homme ne fasse que chercher ces deux fois deux font quatre, traverse les océans, risque sa vie dans ces recherches, mais trouver, trouver réellement, il a peur, vraiment peur. Il comprend que quand il aura trouvé, il n’y aura plus rien à chercher. Les ouvriers ayant terminé leur besogne, reçoivent au moins de l’argent, vont au cabaret, puis au poste. Eh bien ! voilà de l’occupa-