— Et tu refuses de lui pardonner ! cria Mitia d’un ton de vif reproche.
— Sois tranquille, je le sauverai, s’empressa de dire Katia, qui sortit vivement.
— Tu as pu lui refuser ton pardon quand elle-même te le demandait ? s’écria de nouveau Mitia avec amertume.
— Ne lui fais pas de reproches, Mitia, tu n’en as pas le droit ! intervint avec vivacité Aliocha.
— C’est son orgueil et non son cœur qui parlait, dit avec dégoût Grouchegnka. Qu’elle te délivre, je lui pardonnerai tout… »
Elle se tut, comme si elle refoulait quelque chose et ne pouvait pas encore se remettre. Elle était venue tout à fait par hasard, ne se doutant de rien et sans s’attendre à cette rencontre.
« Aliocha, cours après elle ! Dis-lui… je ne sais quoi… ne la laisse pas partir ainsi !
— Je reviendrai avant ce soir ! » cria Aliocha, qui courut pour rattraper Katia.
Il la rejoignit hors de l’enceinte de l’hôpital. Elle se hâtait et lui dit rapidement :
« Non, il m’est impossible de m’humilier devant cette femme. J’ai voulu boire le calice jusqu’à la lie, c’est pourquoi je lui ai demandé pardon. Elle m’a refusé… Je l’aime pour ça ! dit Katia d’une voix altérée, et ses yeux brillaient d’une haine farouche.
— Mon frère ne s’y attendait pas, balbutia Aliocha. Il était persuadé qu’elle ne viendrait pas…
— Sans doute. Laissons cela, trancha-t-elle. Écoutez : je ne peux pas vous accompagner à l’enterrement. Je leur ai envoyé des fleurs pour le cercueil. Ils doivent avoir encore de l’argent. S’il en faut, dites-leur qu’à l’avenir je ne les abandonnerai jamais. Et maintenant, laissez-moi, laissez-moi, je vous en prie. Vous êtes déjà en retard, on sonne la dernière messe. Laissez-moi, de grâce ! »
III
Enterrement d’Ilioucha. Allocution près de la pierre
Il était en retard, en effet. On l’attendait et on avait même déjà décidé de porter sans lui à l’église le gentil cercueil orné de fleurs. C’était celui d’Ilioucha. Le pauvre enfant était mort deux jours après le prononcé du jugement. Dès la porte