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Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov, trad. Mongault, tome 2.djvu/60

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dont on voyait parmi d’autres, à l’auberge, la photographie minuscule, en uniforme et en épaulettes. Les deux cadettes mettaient, lors de la fête communale ou pour aller en visite, des robes à la mode bleu ciel ou vertes, avec une traîne longue d’une aune, mais le lendemain, levées dès l’aube comme de coutume, elles balayaient les chambres, vidaient les eaux, nettoyaient les chambres des voyageurs. Bien qu’il eût déjà fait sa pelote, Tryphon Borissytch aimait fort à rançonner les fêtards. Il se rappelait qu’un mois auparavant, la bombance de Dmitri Fiodorovitch avec Grouchegnka lui avait rapporté, en un jour, près de trois cents roubles, et il l’accueillait maintenant avec un joyeux empressement, flairant une nouvelle aubaine rien qu’à la façon dont Mitia avait abordé le perron.

« Alors, comme ça, Dmitri Fiodorovitch, vous voici de nouveau parmi nous ?

— Un instant, Tryphon Borissytch ! D’abord, où est-elle ?

— Agraféna Alexandrovna ? devina aussitôt le patron en lui jetant un regard pénétrant. Elle est ici…

— Avec qui ? Avec qui ?

— Avec des voyageurs… Il y a un fonctionnaire, qui doit être Polonais, d’après sa façon de parler, c’est lui qui l’a envoyé chercher ; puis un autre, son camarade ou son compagnon de route, qui sait ? Ils sont en civil…

— Et ils font bombance ? Ce sont des richards ?

— Bombance ! C’est des pas grand-chose, Dmitri Fiodorovitch.

— Des pas grand-chose ? Et les autres ?

— Deux messieurs de la ville qui se sont arrêtés en revenant de Tchernaïa. Le plus jeune est un parent de M. Mioussov, j’ai oublié son nom… Vous devez connaître l’autre, M. Maximov, ce propriétaire qui est allé en pèlerinage à votre monastère.

— C’est tout ?

— C’est tout.

— Suffit, Tryphon Borissytch, dis-moi maintenant, que fait-elle ?

— Elle vient d’arriver, elle est avec eux.

— Est-elle gaie ? Elle rit ?

— Non, pas trop… Elle paraît même s’ennuyer. Elle passait la main dans les cheveux du plus jeune.

— Le Polonais, l’officier ?

— Mais il n’est ni jeune, ni officier ; non, pas à lui, au neveu de Mioussov… j’ai oublié son nom.

— Kalganov ?