Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 1.djvu/122

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aussi qu’elle est cupide, qu’elle prête à gros intérêts. Je te dis que j’allais pour la battre, et je suis resté chez elle ! C’est la lèpre, vois-tu! et je me suis contaminé. Tout est fini, plus rien n’est possible. Le cycle des temps est révolu. Voilà mon histoire. J’avais trois mille roubles en allant chez elle. Nous partîmes tous deux pour faire la fête à vingt-cinq verstes d’ici. Je lis venir des tziganes; le Champagne coula; j’en grisai tous les moujiks, tous les babas et toutes les jeunes filles que nous renco.ntràmes. Trois jours après, j’étais à sec. Et crois-tu que j’aie rien obtenu d’elle ? Pas ça (et Dmitri fît craquer les ongles de ses pouces contre ses dents) ! Je te dis que cette femme est glissante comme une couleuvre. La gredine! Une couleuvre, un serpent, te dis-je! Le petit doigt de son pied gauche fait penser à un serpent. Je l’ai vu, je l’ai même baisé ; mais c’est tout, je te jure. Elle me dit : « Veux-tu que je t’épouse, quoique tu sois pauvre ? Promets-moi seulement de ne pas me battre et de me laisser faire tout ce que je voudrai. » Et elle rit, elle rit !

Dmitri Fédorovitch se leva, en proie à un accès de rage. On eût pu le croire ivre. Ses yeux étaient injectés de sang.

— Et tu l’épouseras ?

— Si elle consent, tout de suite ; si elle ne veut pas, je serai son valet. Toi... toi, Alioscha....

Il s’arrêta devant Alioscha et se mit à le secouer violemment par les épaules.

— Mais sais-tu, innocent, que tout cela, c’est de la folie, une horrible folie, une tragédie ! Apprends, Alexey, que je suis vil, que j’ai de viles passions ; mais être un voleur,