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de propreté. Des fleurs rares ornaient les tablettes des fenêtres. Mais le luxe principal consistait, naturellement, en une table servie avec élégance, une élégance relative, il est vrai : une nappe blanche, un couvert étincelant, trois espèces de pains très-dorés, deux bouteilles de vin, deux autres bouteilles d’hydromel fait au monastère, et une grande cruche en verre de kvas renommé dans le pays. Point d’eau-de-vie.

Rakitine raconta plus tard que le dîner était composé de cinq services. Il y avait une soupe à l’esturgeon et des gâteaux au poisson ; puis un poisson cuit d’une manière particulièrement recherchée, puis des boulettes de poisson rouge, de la glace, une compote, et enfin un blanc-manger. Rakitine n’avait pas été jugé digne de prendre part à ce gala. On y avait invité le Père lossif, le Père Païssi et un autre moine. Ces trois religieux attendaient déjà quand Mioussov, Kalganov et Ivan Fédorovitch entrèrent. Le pomiestchik Maximov se tenait à l’écart. Le Père supérieur vint au-devant de ses invités. C’était un vieillard de haute taille, maigre, mais très-solide encore, aux cheveux noirs abondamment semés d’argent, le visage long, imposant, émacié. Il salua silencieusement, les invités s’approchèrent pour qu’il les bénît ; Mioussov voulut même lui baiser la main, mais le supérieur la retira ; pourtant Kalganov et Ivan la baisèrent à la russe.

— Nous devons nous excuser auprès de Votre Révérence, commença Petre Alexandrovitch d’un ton aimable, à la fois important et respectueux. Fédor Pavlovitch ne peut se rendre à votre invitation, il a dû décliner cet honneur, et pour cause. Dans la cellule du Révérend Père Zossima, il a