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Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 2.djvu/339

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— C’est un juste ! Il m’a sauvée !

Elle s’évanouit.

Cette guérison miraculeuse, — quoiqu’elle s’explique peut-être physiologiquement par la réaction nerveuse d’une très-vive émotion, — émerveilla l’assistance. Chacun connaissait la maladie de Liza, nul n’hésitait à attribuer à Alioscha ce rétablissement inattendu.

L’effet fut prodigieux. Tout le monde s’agitait, parlait ; le président ne songeait même pas à réclamer l’ordre et le silence. Les juges partageaient l’émoi général. Alioscha seul restait calme. Il souriait à tous ces visages où se peignait tant d’amour pour lui ; des larmes lui venaient aux yeux, de ces larmes sereines, mieux que de joie, mieux que de bonheur.

Enfin, chose sans exemple peut-être dans nos fastes judiciaires, le président demanda aux jurés s’ils voulaient se retirer dans la salle des délibérations. Mais tous ensemble, et sans se consulter, répondirent que ce n’était pas nécessaire ; séance tenante, Alioscha fut acquitté.

Katherina Ivanovna l’emmena chez elle, ainsi que Liza. On avait eu de la peine à dérober aux ovations ce héros du jour, mais il dominait tous ceux qui l’approchaient par son calme extraordinaire. Chez Katherina Ivanovna, on retrouva madame Khokhlakov, qui, ne sachant où était sa fille, la cherchait et pensa mourir de joie en la voyant marcher. Ce jour même, les fiançailles des deux jeunes gens furent faites. Madame Khokhlakov fut, à cette occasion, moins exubérante qu’elle n’avait