Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 2.djvu/77

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Vous feriez bien de ne plus vous moquer de la Pologne, observa gravement Kalganov.

— C’est bon, mon fils ! En le traitant ainsi, je n’ai pas voulu exprimer mon opinion sur tous les Polonais. Un seul laïdak ne constitue pas toute la Pologne ! Tais-toi, joli gamin, et mange des bonbons, va !

Pendant ce temps, Grouschegnka essayait vainement de danser.

— Elle a bu, la barinia ! disaient les babas.

— Hi ! hi ! Elle a bu ! Hi ! hi !

— Mitia, emmène-moi d’ici… Prends-moi, Mitia !

Mitia la saisit dans ses bras et la porta sur le lit, dans la chambre voisine.

La fête continuait et, au bruit des cris de joie et des chants, Mitia caressait Grouschegnka.

— Laisse-moi… dit-elle d’une voix suppliante. Ne me touche pas avant que je sois à toi… Je te dis que je serai tienne, épargne-moi encore ! Tant que les autres seront là. Il est ici, cela me fait horreur !…

— J’obéis. Pas même la pensée… Je te respecte, murmurait Mitia. Oui, c’est dégoûtant ici, oh, oui !

Et sans cesser de l’étreindre doucement, il s’agenouilla près du lit.

— Mitia, certes, tu es un tigre… mais que tu es noble ! Oui, il faut que ce soit honnêtement… toujours honnêtement désormais… Soyons honnêtes, bons, ne vivons pas comme des bêtes, soyons bons… Emmène-moi loin, entends-tu ? Je ne veux pas ici, mais loin, loin…

— Absolument ! dit Mitia en l’étreignant plus fort. Je t’emmènerai au bout du monde !… Oh ! je donnerais toute