Page:Dostoïevski - Souvenirs de la maison des morts.djvu/266

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— Qui donc t’a tiré les oreilles ? demanda quelqu’un.

— Le maître de police, parbleu ! pour cause de vagabondage, camarades. Nous étions arrivés à K… moi et un autre vagabond, Ephime. (Il n’avait pas de nom de famille, celui-là.) En route, nous nous étions refaits un peu dans le hameau de Tolmina ; oui, il y a un hameau qui s’appelle comme ça : Tolmina. Nous arrivons dans la ville et nous regardons autour de nous, pour voir s’il n’y aurait pas un bon coup à faire, et puis filer ensuite. Vous savez, en plein champ on est libre comme l’air, tandis que ce n’est pas la même chose en ville. Nous entrons tout d’abord dans un cabaret : nous jetons un coup d’œil en ouvrant la porte. Voilà un gaillard tout hâlé, avec des coudes troués à son habit allemand, qui s’approche de nous. On parle de choses et d’autres. — Permettez-moi, qu’il nous dit, de vous demander si vous avez un document .

— Non ! nous n’en avons pas.

— Tiens, et nous non plus. J’ai encore avec moi deux camarades qui sont au service du général Coucou . Nous avons un peu fait la vie, et pour le moment nous sommes sans le sou : oserai-je vous prier de bien vouloir commander un litre d’eau-de-vie ?

— Avec grand plaisir, que nous lui disons. — Nous buvons ensemble. Ils nous indiquent alors un endroit où l’on pourrait faire un bon coup. C’était dans une maison à l’extrémité de la ville, qui appartenait à un riche bourgeois. Il y avait là un tas de bonnes choses, aussi nous décidons de tenter l’affaire pendant la nuit. Dès que nous essayons de faire notre coup à nous cinq, voilà qu’on nous attrape et qu’on nous mène au poste, puis chez le maître de police. — Je les interrogerai moi-même, qu’il dit. Il sort