Page:Dostoievski - Les Pauvres Gens.djvu/178

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des soupçons, il y a un petit homme que je soupçonne fort. Ces scélérats sont capables de tout ! Ils vous trahiraient ! Ils vendraient toute votre vie privée pour moins d’un groch ! Rien n’est sacré pour eux ! Je sais maintenant qui m’a joué ce tour : c’est un coup de Ratazaïeff. Il connaît quelqu’un dans notre division, et sans doute, en causant, il lui a raconté la chose avec des détails de son invention ; ou bien il a parlé de cela dans sa division, et petit à petit l’histoire s’est répandue dans la nôtre. À la maison, tout le monde est parfaitement instruit de tout, et l’on montre du doigt votre fenêtre ; je sais qu’on la montre. Hier, quand je suis allé dîner chez vous, toutes les têtes se sont mises aux fenêtres. « C’est l’union d’un diable avec un enfant », a dit la logeuse, et elle vous a ensuite appliqué une expression inconvenante. Mais tout cela n’est rien à côté de l’infâme projet de Ratazaïeff : il veut nous fourrer, vous et moi, dans sa littérature, écrire sur nous une fine satire ; lui-même l’a dit, et de bonnes gens, des employés de notre division, me l’ont répété. Je ne puis même penser à rien, matotchka, et je ne sais à quoi me résoudre. Il n’y a pas à le cacher, nous avons