Page:Dostoievski - Les Pauvres Gens.djvu/205

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je voulus me décrotter un peu ; mais Snéguireff, l’appariteur, ne me le permit point ; « Cela ne se peut pas, barine, me dit-il, vous abîmeriez la brosse, qui fait partie du mobilier de l’État. » Voilà comme ils sont maintenant, matotchka, c’est-à-dire que pour ces messieurs je suis moins que le paillasson sur lequel ils essuient leurs pieds. Savez-vous ce qui me tue, Varinka ? — Ce n’est pas l’argent, mais tous ces tracas de la vie, tous ces chuchotements, ces légers sourires, ces petits mots piquants. Son Excellence peut, par hasard, me remarquer. — Eh ! matotchka, mes beaux jours sont passés ! Aujourd’hui j’ai relu toutes vos lettres ; c’est triste, matotchka ! Adieu, ma chère ; que le Seigneur vous conserve !

M. DIÉVOUCHKINE.

P. S. — Je voulais, Varinka, prendre le ton tragi-comique pour vous raconter mon malheur, mais évidemment je ne suis pas en veine de plaisanterie. J’aurais voulu vous complaire. — Je passerai chez vous, matotchka, je n’y manquerai pas ; j’irai vous voir demain.