Page:Dostoievski - Les Pauvres Gens.djvu/34

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cent de fagots que nous soyons de la même branche ; mais n’importe, les liens du sang ne m’en attachent pas moins à vous, et maintenant je suis votre parent le plus proche, votre protecteur naturel, car là où vous étiez le plus en droit de chercher protection et défense, vous n’avez trouvé que trahison et injure. Quant aux vers, je vous dirai, matotchka, qu’à mon âge il est inconvenant de s’adonner à cet exercice. Les vers, c’est de la sottise ! Dans les écoles même à présent on fouette les moutards qui en font… voilà ce que c’est que la versification, ma chère.

Que parlez-vous dans votre lettre, Varvara Alexéievna, de confort, de tranquillité, etc. ? Je ne suis pas difficile ni exigeant, matotchka ; jamais je n’ai vécu mieux qu’à présent ; pourquoi donc m’aviserais-je sur le tard de faire le dégoûté ? Je suis nourri, vêtu, chaussé ; qu’ai-je besoin de rechercher des fantaisies ? — Je ne suis pas le fils d’un comte ! — Mon père n’appartenait pas à la noblesse, et, tout chargé de famille qu’il était, il ne gagnait pas ce que je gagne. Je ne suis pas un efféminé ! Du reste, pour dire la vérité, tout était mieux dans mon ancien logement, il n’y a pas de comparaison ; on y était plus à l’aise,