Page:Doumic - George Sand Dix Conferences sur sa vie et son oeuvre 1922.djvu/97

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ment à inventer de belles histoires, afin que cela les amuse.

Un peu plus tard il se produit chez Aurore un phénomène qui n’est guère moins curieux. Vous vous êtes sans doute demandé parfois comment procèdent les descriptifs, pour tracer ces tableaux dont tous les traits atteignent à un relief si intense et s’imposent à nous aussi impérieusement que ceux de la réalité. George Sand se souvient qu’à Nohant, quand on lui lisait du Berquin, elle écoutait assise devant le feu dont elle était protégée par un vieil écran de taffetas vert. Peu à peu elle perdait le sens des phrases. Des images se dessinaient devant elle et venaient se fixer sur l’écran vert. « C’étaient des bois, des prairies, des rivières, des villes d’une architecture bizarre et gigantesque… Un jour ces apparitions devinrent si complètes que j’en fus comme effrayée et que je demandai à ma mère si elle ne les voyait pas. » Voilà cette hallucination qui fait l’écrivain pittoresque, qui lui met sous les yeux, fût-ce entre quatre murs, un paysage complet, organisé, dont il n’a plus qu’à suivre les lignes,