Page:Doumic - La Poésie lyrique en France au dix-neuvième siècle, 1898.djvu/99

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l’art pour l’art, on arrive, en effet, à faire le vide en art, et à prendre pour ce qui est l’art ce qui en est seulement la forme extérieure, l’appparence.

Vous voyez que, comme théoricien, Théophile Gautier est allé trop loin, et c’est que, je crois, il avait le goût du paradoxe. Mais, quoi qu’il en soit, son œuvre a été efficace : elle a été utile et elle a ramené les écrivains, les poètes, à avoir un souci plus complet de leur métier, à faire attention davantage aux questions de forme, à donner à l’expression un souci sévère qu’ils n’avaient pas jusque-là.

C’est en 1866 que parut, chez un éditeur inconnu jusque-là, un recueil de vers intitulé le Parnasse contemporain. L’éditeur est depuis devenu fort célèbre : c’est l’éditeur Lemerre ; et quelques-uns des Parnassiens sont arrivés à une grande réputation. Le chef de l’école parnassienne, c’est Leconte de Lisle, et vous allez voir comment Leconte de Lisle prend place justement à l’opposé des théories qui avaient été les théories romantiques. Leconte de Lisle pose en principe que le premier devoir du poète, c’est d’être impersonnel. Il a horreur de ce qu’il y a d’impudique, pourrait-on dire, dans cette façon d’aller faire les honneurs de soi-même à tout Leconte de Lisle.