Elle ne pouvait détacher son regard du jeune garçon, immobile devant elle :
— Et où est mon fils ? interrogea-t-elle avec effort.
— Ce soir, il sera dans vos bras, madame.
— Comment ! il songe à quitter la ville ! Quelle imprudence !
— Mais… ne sont-ce pas là les ordres que vous lui avez envoyés ?
— Moi !
— Hugonet ne venait-il donc pas de votre part ?
— Si fait. Mais je l’avais simplement chargé de s’entendre avec mon fils et les bourgeois de Lille pour aviser un moyen de me faire entrer dans la place.
— Oh ! mes pressentiments ! murmura Gaultier accablé.
Se jetant aux pieds de la comtesse :
— Pardonnez-moi, madame, je suis un malheureux, j’ai perdu mon maître en voulant le sauver.
Et il lui raconta ses inquiétudes, ses soupçons ; comment il s’était déterminé à venir en éclaireur vérifier le récit du pêcheur, et comment, trompé par les apparences, il avait écrit au jeune comte de venir sans crainte.
Marguerite écoutait, atterrée ; de grosses larmes coulaient sur ses joues pâles.
Cette douleur silencieuse émut, plus que des reproches, le pauvre Gaultier.
— Ne pleurez pas, madame, je vous en conjure, dit-il avec élan. J’ai fait le mal, je saurai le réparer. Je vais rentrer à Lille, coûte que coûte, et avertir mon maître.
— Non, ce serait vous exposer inutilement.
— Qu’importe, madame ; je n’ai plus de mère à consoler…
Il s’arrêta brusquement : une troupe de soldats, surgissant d’un chemin creux, entourait la maison.