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les apprentis de l’armurier

sans tarder assiéger la cité rebelle, et Harwelt prépara un plan qui, cette fois, devait immanquablement réussir.

Les Lillois ne montrèrent aucune inquiétude : la présence de leur jeune comte leur communiquait une confiance sans bornes.

Ils triompheraient assurément, et deviendraient la première ville des Flandres, détrônant Bruges, Gand et ses autres rivales.

Guy s’accommodait à merveille de sa nouvelle situation, présidant le conseil avec le « rewart » à sa droite, passant des revues, paradant à pied et à cheval (c’était là son seul souci) et se laissant admirer, courtiser, flatter comme s’il n’eut fait cela que toute sa vie.

— Ce n’est pas si difficile que l’on croit d’être grand seigneur, disait-il à Gaultier, qui lui avait été rendu et qui, partageant sa fortune, étant devenu son écuyer, le servait avec un admirable dévouement. Ma foi ! cela serait fort supportable si notre belle tante ne venait pas nous déranger, et si l’attachement de nos fidèles Lillois ne m’obligeait à l’attendre, au lieu de battre prudemment en retraite.

En effet, la perspective d’un siège et des dangers y attachés réjouissait médiocrement le petit-fils de l’empereur Baudouin, le fils du brave Guillaume de Dampierre, un des héros de la Croisade. Bien boire, bien manger, bien dormir, lui semblait infiniment plus récréatif, et quand il lui fallut revêtir le heaume et la cuirasse, demeurer sans sourciller sous une grêle de flèches et marcher droit à l’ennemi au milieu de ses troupes, l’ex-apprenti regretta plus d’une fois son existence paisible, près de Douce, sa petite amie, sous le gai soleil de Provence.

Bon sang ne peut mentir ! répétaient les vétérans des dernières guerres, en le voyant passer sur son petit cheval