Page:Doutes sur la religion, suivies de l'Analyse du Traité theologipolitique de Spinosa, 1769.djvu/57

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l’homme eſt eſſentiellement mortel, donc il n’eſt pas beſoin d’imaginer un péché originel pour faire entrer la mort dans le monde. Par la loi de la nature tous les corps tendent ſans ceſſe à s’altérer, à ſe décompoſer & à ſe détruire.

Mais d’où vient cette pente prétendue que tous les hommes ont au mal ? C’eſt une ſuite du péché originel.

1°. Elle ne peut venir de Dieu à moins qu’il ne nous l’eût donnée que pour nous en punir : c’eſt lui faire dire, en conséquence de ton péché tu aimeras le péché, & tu trouveras toujours du plaiſir à l’aimer.

2°. Cette pente ne vient pas de nous-mêmes ; ſommes-nous maîtres de nous donner ou de nous ôter des penchans, nous pouvons tout au plus les affoiblir en leur oppoſant leurs contraires. Si ces penchans dépendoient de nous, nous les changerions à notre gré & ils ne ſe trouveroient point dans tous les hommes.

3°. Cette pente ne vient point des créatures placées hors de nous. Elles ne peuvent nous donner ni facultés ni inclinations, elles ſervent tout au plus à l’exercice des facultés qui ſont en nous : d’où je conclus que tous nos penchans