notre ami le vicaire sauta du siège pour enfiler tout courant l’allée du jardin. Holmes avait déjà fait sa toilette. Nous nous hâtâmes à la rencontre de notre visiteur.
Il était si agité qu’à peine il pouvait articuler un son ; mais enfin, par bribes et morceaux, il vint à bout du tragique récit qu’il avait à nous faire.
— Nous sommes possédés du diable, monsieur Holmes ! s’écria-t-il. Ma pauvre paroisse est possédée du diable ! Satan lui-même opère en liberté chez nous. Il nous tient à merci.
Le pauvre homme, secoué de soubresauts convulsifs, eût prêté à rire sans son visage terreux et ses yeux hagards. Enfin il lâcha l’horrible nouvelle :
— M. Mortimer Tregennis est mort dans la nuit. Et dans des conditions qui rappellent absolument celles du malheur qui a frappé sa famille.
Holmes fit un bond. À cette minute, il n’était plus qu’une énergie.
— Pouvez-vous, dit-il au vicaire, nous emmener tous les deux dans votre voiture ?
— Oui, certes.
— Alors, Watson, nous en serons quittes pour déjeuner plus tard. À votre disposition, monsieur Roundhay. Vite ! vite ! Il faut que nous arrivions avant qu’on n’ait rien dérangé.
M. Mortimer Tregennis occupait chez le vicaire deux pièces d’angle, situées l’une au-dessus de l’autre : en bas, un grand salon ; en haut, la chambre. L’une et l’autre pièces avaient vue sur une pelouse servant de terrain pour le croquet. Nous arrivâmes avant le médecin et la police ; on n’avait touché à rien. Qu’on me permette de décrire la scène telle qu’elle s’offrit à moi par cette brumeuse matinée de mars ; elle m’a laissé une impression qui jamais ne s’effacera de ma mémoire.