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LETTRES D’UN INNOCENT

tion, te répéter toujours de toute mon âme courage et foi, t’embrasser de tout mon cœur, de toutes mes forces, comme je t’aime, ainsi que nos chers et adorés enfants.

Ton dévoué,

Alfred.

Baisers à tous.

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Le 24 décembre 1896.
Ma chère et bonne Lucie,

Je t’ai écrit quelques lignes seulement il y a peu de jours. Mais ma pensée est tellement avec toi, avec nos enfants, nuit et jour ! Je sais aussi tout ce que tu souffres, tout ce que vous souffrez tous, que je veux venir causer avec toi avant l’arrivée de ton courrier, si impatiemment attendu chaque mois.

Je sais aussi combien cela soulage de voir seulement l’écriture de ceux que l’on aime, dont on partage toutes les douleurs ; je sais aussi qu’il semble ainsi avoir une parcelle d’eux, de leur cœur, les sentir palpiter et vibrer à côté de soi. Et je voudrais pouvoir trouver des expressions qui rendent mieux, non pas ce que je souffre, tu le sais, mon cœur comme le tien n’est qu’une plaie saignante, mais ce que je souffre pour toi, pour nos enfants, combien ma vie est pour vous tous et que, si j’arrive à tenir debout, malgré tous les déchirements de l’être, car toute impression, même banale, même extérieure, produit sur moi l’effet d’une profonde blessure, c’est qu’il y a toi, nos enfants. Je relisais aussi, comme chaque mois, les lettres que j’ai de toi, les compagnons de ma profonde solitude, les lettres de tous, et je crois