446 SOUVENIRS ET CORRESPONDANCE
mun, d’estime mutuelle, d’affinités d’esprit et de cœur, d’amour, en un mot, d’amour profond, rayonnant, indestructible.
Dans cette chambre où son pauvre corps souffrait affreusement, une chose n’avait point changé. Ils étaient restés l’un pour l’autre tels qu’ils étaient sortis de l’épreuve, grandis, plus compréhensifs et plus humaïns. Le colonel, aux yeux de sa femme, était toujours le héros du plus tragique des destins, dont la fermeté d’âme, la noblesse de caractère, l’inébranlable courage avaient ému la terre entière. Et de même, Mme Dreyfus n’avait jamais cessé d’être pour lui un être d’exception, son étoile protectrice, la lumière vers laquelle, du fond de son cachot, il s’était tourné jour et nuit. Il lui savait gré de sa confiance, de son âme fidèle, de son invincible foi, de ses vertus de mère et de sa réconfortante tendresse. Et il lui vouait une admiration sans bornes pour son stoicisme et sa vaillance durant le pénible et long combat, alors que voilée de deuil, simple et émouvante, elle rallia autour d’elle, comme autour d’un permanent flambeau, tant d’enthousiasmes et tant d’énergies.
Fe
Malgré tous les efforts qui furent tentés pour le sauver, le malade allait s’affaiblissant.
Le 11 juillet 1935, comme son fils allait le voir, ainsi que chaque jour, le colonel Dreyfus garda longuement sa main dans les siennes sans proférer une parole, lui transmettant ainsi, dans ce geste muet, son ultime pensée. Et le lendemain, vers cinq heures de ÉRCE + l’après-midi, entouré des siens, il ferma les yeux et He ie s’éteignit doucement.
FIN