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CHAPITRE XIII

chance et malchance


Trois jours plus tard, comme le chirurgien Larrey pénétrait dans le quartier impérial pour faire sa visite journalière à l’Empereur, il trouva Napoléon en train de dicter des ordres.

Des officiers, plume en main, écrivaient rapidement, les uns appuyés sur leur genou, d’autres sur le coin de la table, et autour du grand chef, Monge, le savant qu’il affectionnait, M. Daru, commis principal à la Guerre, et le fidèle Menneval, étaient debout, immobiles.

Le silence absolu régnait, rompu seulement par la voix brève de Napoléon, nuancée d’un très léger accent corse.

Avec sa faculté d’assimilation prodigieuse, l’Empereur dictait, sans difficulté apparente, des ordres embrassant les opérations les plus compliquées ; il expédiait des dépêches à Paris, à Toulon, en Hollande, à Strasbourg, en Italie, pour l’organisation définitive de ses armées.

Sa pensée claire, génialement lumineuse, ne laissait rien échapper ; c’était pour son entourage (comme ce sera éternellement pour tous ceux qui liront son histoire), un émerveillement et une stupeur que la puissance inouïe du cerveau de cet homme !

On eut dit que, devant l’infini de son regard, le globe entier s’étalait, classé en tableaux méthodiquement synoptiques, tant il passait avec facilité d’un sujet à un autre sans négliger les plus petits détails.

Au moment où Larrey entrait en s’inclinant, Napoléon dictait un ordre