Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 3, 1904.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tamment les premières maisons, devant cette furieuse attaque de deux sections seulement.

Il faut dire que, depuis Wissembourg, les Prussiens avaient une peur abominable des turcos.

Avec un sang-froid, un à-propos merveilleux, le jeune officier organisa ses Arabes, pour tâcher de conserver ce qu’il venait de conquérir de la position.

Son ardeur, son entrain, son enthousiasme galvanisèrent non seulement ses hommes, mais des habitants qui vinrent les renforcer.

On peut dire que ce fut à son énergie et à sa ténacité que Montbéliard dut d’être enlevé, grâce au point d’appui qu’il avait emporté de haute lutte avec une poignée d’hommes.


Mais toute médaille a son revers ! Pendant la première partie de la lutte, Georges Cardignac avait reçu une balle dans l’épaule ; et, le soir de ce combat, ce fut dans une petite chaumière, transformée en ambulance, qu’il vit arriver Pierre Bertigny que Paul Augier avait envoyé prévenir. Sans être grave, la nouvelle blessure de notre ami le rendait définitivement incapable de poursuivre la campagne. Pierre le trouva donc en larmes, sous la garde du fidèle Mohiloff et du grand Barka.

Le jeune turco se désolait à l’idée que, le lendemain, la bataille devait reprendre et qu’il n’y serait pas ; mais malgré son désir, l’évidence était là ! Que faire avec un bras enserré de bandelettes, et la fièvre consécutive aux blessures par coup de feu !

— Je n’ai vraiment pas de chance, cousin Pierre, dit-il, et le proverbe : Non bis in idem est vraiment faux ! Touché deux fois en si peu de temps ! C’est navrant !

— En tout cas ! mon cher enfant, j’ai fait le possible pour calmer l’amertume de cette vilaine inaction à laquelle vous êtes condamné, dit Paul Augier, et je vous promets, pour demain, un pansement de premier ordre.

— Oui ! je ne veux pas te faire languir, dit à son tour Pierre, mais demain tu recevras ton brevet de médaillé militaire !… Le général Bourbaki me l’a promis. C’est ton lieutenant, M. Paul Augier, que tu dois avant tout remercier ; car, à peine l’action terminée, et sans même dire un mot de la part qu’il y avait prise, il est accouru à l’État-major pour demander cette récompense pour toi.