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CHAPITRE IX

où georges cardignac éprouve une surprise peu ordinaire


Quand il vous arrive d’entendre parler de « forts », je suis sûr, mes enfants, que votre esprit évoque immédiatement les hautes murailles de pierre, ordonnancées avec art par Vauban, et dont vous avez pu contempler souvent des spécimens, aujourd’hui démodés. Vous reconstituez alors, dans votre imagination, des talus corrects aux verts gazonnements, des glacis réguliers ; vous évoquez la silhouette d’un lourd canon de bronze, allongeant sa gueule menaçante au travers d’une embrasure, et vous piquez à côté pour en compléter le pittoresque — un petit pioupiou rouge et bleu qui, l’arme au bras, fait les cent pas sur le plan incliné de la plongée, tout en examinant l’horizon.

Mais en même temps, ce mot « un fort » ramène également votre pensée vers le jouet de ce nom, le fort de carton à belles tours et à pont-levis à chaînes (c’est naturellement aux petits garçons que je m’adresse) dont tous, dis-je, vous avez eu — ou espérez — un spécimen, afin d’organiser de grandes guerres avec vos soldats de plomb.

Eh bien ! mes enfants, si vous aviez accompagné la colonne dont faisait partie notre ami Georges Cardignac, vous auriez sans doute éprouvé une sérieuse désillusion quand on vous eût montré le fort provisoire de Kita, car ce fort-là n’avait, avec ceux que vous connaissez, qu’une très vague ressemblance.