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Elle avait été héroïque sans pose et sans souci de faire figure.

Maintenant elle aimait, et c’étaient d’autres voix qu’elle écoutait, celles des aïeules dont jadis des vaillants avaient porté les couleurs et qui lui disaient de garder jalousement un bonheur revenu de si loin.

L’heure de l’héroïsme, qui sonne rarement pour la femme, était passée. Celle de l’amour, qui remplit sa vie, était venue…

Puis une vision venait de s’interposer entre elle et l’aérostat, celle d’une crypte de neige où s’allongeaient, dans leur linceul glacé, les deux vrais « Robinsons de l’air », les passagers de l’Aigle, martyrs du Pôle, et une larme perla à ses longs cils.

Georges Durtal sentit cette larme couler sur sa main et vivement s’agenouilla.

— Christiane, ma bien-aimée, tu pleures !…

— Reste ainsi, Georges, fit-elle… prions pour Andrée, veux-tu ?

Et en remontant vers le château, serrée contre lui, heureuse, mais frissonnante, elle murmura encore, les yeux perdus au loin :

— Pauvre Andrée !…